Insert graphique réalisé par Stéphane Vacelet, professeur d'Arts Appliqués au lycée E. Livet

AVANT-PROPOS

PRESENTATION DE LA RENCONTRE

AUDITORIUM LYCEE LIVET 7 AVRIL 2003

On aimerait parfois écrire des textes sur la pointe des pieds, sans appareil de notes ; légers, aériens. Et, surtout, ne pas être le présentateur requis par la seule actualité. On aimerait donner à chaque mot la poussée d’une rupture. Peser sur les mots, les faire entendre.

Aussi, je placerai cette rencontre musicale sous le signe d’une traversée. Celle-ci va s’effectuer à travers une série de sons, de plis et de replis à l’intérieur de deux imaginaires sonores, celui de la Renaissance anglaise et celui de l’électroacoustique.

Si nous sommes, ici, réunis, c’est pour vérifier que les sons n’ont pas de frontières, qu’ils dessinent notre présence dans le monde, nos engagements et nos passions. Nous savons depuis fort longtemps que le son des émeutes produit des émeutes, (nous reconnaissons immédiatement de la musique guerrière…) mais nous savons aussi que la voix raccommode ce que le cri déchire.

Nous ne sommes pas là pour mesurer le moelleux des fauteuils mais pour nous retrouver et, être au plus près de soi. Exercice assez paradoxal rompant avec toutes les formes de nonchalance et d’ennui.

A vouloir trop voir, nombre de philosophes devinrent musicalement assez sourds. Trop accaparés par les liens unissant la peinture à la poésie ou au théâtre, ils sont passés à côté. Platon, Rousseau, Nietzsche, Jankélévitch font exception.

La composition, le jeu (l’interprétation), l’écoute sont à réexaminer. La pensée musicale a besoin de nouveaux concepts. Les choses sont en train de changer.

Nous mettrons aujourd’hui l’accent sur le moment actif de l’écoute.

Ecouter : c’est ausculter une dynamique de forces sensorielles et intellectuelles ; c’est assigner tout notre corps au déchiffrement.

Ne cherchez pas derrière les sons. La réalité y est des plus banale, prosaïque. C’est dans les sons qu’il faut d’emblée se plonger (fussent-ils déconcertants!).Ces sons peuvent, en effet, être fractionnés, frottés, accélérés, filtrés, ralentis, épaissis ou fluidifiés. Ils empruntent les milles chemins de traverse du numérique et du fictionnel.

Depuis maintenant plus d’une vingtaine d’années de nouveaux gestes sont apparus : le mix, le sampling, le scratch . De nouveaux dispositifs instrumentaux ont été utilisés. Un exemple : la musique assistée par ordinateur. Tout ceci prouve l’ingéniosité des ingénieurs et des artistes. Il ne s’agit nullement de rompre avec notre mémoire sonore, celle des époques qui nous ont précédées, mais de trouver de nouveaux lieux et d’autres types de rencontres pour que de la musique soit produite, jouée et écoutée. Une musique vivante faite par les hommes et pour les hommes.

De manière pour le moins schématique, un compositeur russe définissait encore au début du XXème , les sons du clavecin comme une cage à canari que l’on gratte avec une cuiller. Belle estime ! Les ferraillements du clavecin ont une âme.

La cage en question était peut-être vide. Mais quand même ! Une cage sans oiseau ce n’est plus une cage. De nouvelles fourchettes de sons doivent nous permettre de nous ouvrir à la musique et d’affirmer notre liberté. C’est ce à quoi je vous invite. Merci.

Claude Briantais