LA RAISON DÉFIANT LA CROYANCE

INTRODUCTION

La raison encore appelée logos (dans l’antiquité grecque), lumière naturelle (à l’âge classique) désigne une double exigence :

- un souci de cohérence, d’exactitude, de conformité à la réalité.

- une aspiration : celle d’une vie maîtrisée.

Cette faculté d’ordre, de calcul (ratio) est, nous dit Descartes,  « naturellement égale en tous les hommes ».

Mais, l’homme est un être d’action aussi la raison s’oppose-t-elle fréquemment aux débordements des passions, aux désirs, à l’imagination, aux illusions des sens. Un constat : nous adhérons souvent sans preuve ; sans nous préoccuper des fondements. Comment donc, précisément, circonscrire le rôle et l’impact des croyances? Si la raison est en nous première, pouvons-nous toutefois accéder à des vérités absolues ? Suivre les lois internes de la raison signifie-t-il que tout est intelligible en droit ? Notre propre rapport aux croyances est-il synonyme d’obstacle ? Entrave-t-il tout travail sur soi ? Tout exercice d’élucidation ?

Problème : quel est donc notre pouvoir et quelles en sont les limites ?

I. Définitions à retenir :

Croyance : adhésion subjective à une idée non démontrée ; assentiment non accompagné de preuve (toute adhésion lucide requiert une intervention de la raison).

Adhésion irréfléchie : ce qui est approuvé avant d’être jugé, ce qui relève du pré-jugé, de l’opinion douteuse.

Par croyance, il faut entendre tout assentiment à des affirmations non démontrées ou dont les fondements nous échappent.

NB. Les idées sont conçues par l’entendement. La volonté y adhère, les refuse ou encore les met en doute.

Crédulité : état de celui qui subit l’opinion.

Superstition : croyances à des causes surnaturelles de phénomènes naturels. Ces croyances génèrent de vaines craintes s’agit ici de croyances sans fondement objectif.

II. Sens des formulations :

Une forme d’opinion :

Croire que …

Ex : croire qu’il va faire beau. Ne pas savoir s’il va faire beau (défaut de connaissance). Être conscient de ne pas savoir. Simple certitude subjective.

Deux formes d’engagement :

Croire à …

Croire nous engage à l’action. Engagement total parfois face à l’incertain. « Volonté de croire, sans preuves et contre les preuves, que l’homme peut faire son destin, et que la morale n’est donc pas un vain mot ». Alain

Croire en …

Ex : croire en Dieu. Certitude non rationnelle.

Foi : la plus grande conviction nourrit cet engagement. «C’est le cœur qui sent Dieu, et non la raison. Voilà ce que c’est que la foi. Dieu sensible au cœur non à la raison ». Pascal

On parle de croyances vraies lorsqu’il s’agit de croyances plus ou moins éclairées, c’est-à-dire s’appuyant sur des critères logiques. Croyances auxquelles on a des raisons de faire confiance. Ex : croyance en l’immortalité de l’âme (chez Kant)

III. Causes de la croyance :

Les désirs, les passions, les intérêts... Croire non pas par la preuve mais par l’agrément (ce qui plaît).

N'importe quelle affection humaine peut nous conduire à la notion d’une puissance invisible et intelligente, l’espoir aussi bien que la crainte, la gratitude aussi bien que l’affliction. Mais si nous examinons notre propre cœur ou observons ce qui se passe autour de nous, nous découvrirons que les hommes s’agenouillent bien plus souvent sous l’effet de la mélancolie que sous celui des passions agréables. Nous acceptons facilement la prospérité comme notre dû, et nous nous interrogeons peu sur sa cause ou sur son auteur. Elle suscite la gaieté, l’activité, la vivacité et une intense jouissance de tous les plaisirs de la société et des sens ; et tant que nous demeurons dans cet état d’esprit, nous avons peu le loisir et le goût de penser aux régions invisibles et inconnues. D’un autre côté, tout accident funeste nous alarme et nous incite à rechercher les principes de son origine ; la crainte du futur jaillit et l’esprit, en proie à la méfiance, à la terreur et à la mélancolie, a recours à toutes les méthodes susceptibles d’apaiser ces puissances intelligentes et secrètes dont, pensons-nous, notre sort dépend entièrement.

Hume

Croyances et pratiques

Ce rapport avec un ordre transcendant et absolu détermine certaines conduites, vise au dépassement de la réalité ordinaire et de soi-même.

La religion est un ensemble de croyances et de pratiques cultuelles.

Dans sa diversité*, le fait religieux revêt une dimension universelle. C’est un fait social, un système de croyances et de pratiques codifiées qui lient moralement dans le temps et dans l’espace une même communauté. Ces représentations génèrent le sentiment du sacré : sentiment où se mêlent le respect, la vénération, la crainte révérentielle face à l’incommensurable, à l’infinie puissance du divin.

*. Exemples : l’animisme (où la nature est totalement investie par des forces surnaturelles ; des « esprits ») ; le polythéisme ou encore le monothéisme.

Ces croyances peuvent être totémiques** ou peuvent s’appuyer sur l’autorité des dogmes, sur des vérités révélées ; des doctrines se référant à des commandements.

Exemples : le Coran, l’Écriture sainte. Citons le dogme du péché originel dans le catholicisme. Mais cette prégnance du dogme ne peut se maintenir qu’en ayant recours à une théologie du sacerdoce, une pratique. Ainsi le pouvoir de l’Église  repose-t-il sur le ministère du pape et des évêques, une hiérarchie cléricale.

** Certains mythes peuvent être considérés comme des variations de ces croyances sacrées. Le déchiffrement des rituels funéraires en témoigne.

 

IV. Du bon usage de notre raison

Exercice :

Recherches :

Article "Divination" de Diderot (le philosophe s’oppose aux préjugés)


Article "Bâton" de Diderot (les lumières de la philosophie s’opposant aux superstitions)


Article  "Aigle" de Diderot (la philosophie : une religion de la raison ?)