L’HISTOIRE NE NOUS FOURNIT
AUCUNE RÈGLE POUR L’ACTION |
Est-il possible (pour les peuples et les gouvernants) d’en
tirer un enseignement ?
Rendre intelligible un ensemble d’événements, de conduites
et de mentalités, c’est avoir une meilleure connaissance
de ce que nous sommes. Ce qui arrive est toujours, en effet, déterminé
dans l’espace et dans le temps.
Il ne s’agit donc pas de vénérer
le passé, d’idolâtrer des traditions mais de les déchiffrer pour accéder à
notre identité. Il y a là un besoin impérieux de donner un sens à notre destinée
personnelle en l’intégrant dans un devenir historique. Prendre conscience de soi-même, c’est à la fois
tenter de saisir la dynamique historique d’une époque mais aussi se
projeter.
D’où la critique adressée par Merleau-Ponty à la philosophie
hégélienne de l’Histoire :
« L’histoire universelle n’est jamais, ne sera jamais le total de
ce que l’humanité a été ; elle sera toujours en projet, elle sera ce
que l’humanité a été plus ce qu’elle voulait être et veut encore à travers
celui qui parle. »
Les situations concrètes sont très diverses.
Chaque période est singulière.
Les événements ne s’enchaînent jamais exactement de la même manière ;
ne se reproduisent pas à l’identique (même si dans certains cas, ils nous
paraissent analogues). Chaque peuple se détermine de
façon toujours particulière.
L’histoire ne pouvant se répéter aussi suscite-t-elle, par
là-même, l’invention, l’ingéniosité. Dans les situations les
plus difficiles il convient de trouver, précisément, la solution la plus appropriée.
Et, c’est le rôle dévolu aux grandes personnalités
historiques.
L’avenir reste par définition imprévisible.
Nous pouvons seulement en esquisser les contours, lui donner une forme très
provisoire.
Si l’histoire nous permet de comprendre, elle ne
nous permet aucunement d’agir selon telle ou telle maxime morale : elle
ne donne, en aucun cas, des règles
générales de conduite. Dépourvue de valeur pratique,
elle reste sans effet sur le présent aussi unique que changeant. Aucune
règle d’action n’est valable universellement en tout temps et en tout lieu.
L’expérience historique n’instruit pas.
Elle ne constitue nullement "une
clef" qui nous permettrait de résoudre les difficultés
inhérentes à telle ou telle situation dans le monde. Il nous
incombe, bien plutôt, de définir ingénieusement les conditions d'un dépassement.
L'Histoire peut, tout au plus, être édifiante pour de jeunes esprits.
Des exemples marquants puisés dans l'histoire des Anciens ou de personnages
illustres peuvent contribuer à la formation du caractère et du tempérament ;
à l’élévation de l’âme. De tels récits (recueil d’actions vertueuses) concourent plus ou moins directement à l’éducation
morale.
Pour conclure, nous sommes constamment aux prises
avec « le monde libre et vivant
de l’actualité » Hegel.
Inutile donc de chercher, dans le passé, des portes de sortie dérobées.
Le présent n'est jamais la somme de tous les plis et replis du passé.
Suffisant puisqu'il est justement incalculable, nous devons compter avec.