ARTS LIBÉRAUX ET ARTS MÉCANIQUES

 

Ces arts recouvrent une opposition entre activité manuelle et intellectuelle.

Ce clivage peut-il être dépassé ?

Avec Diderot (1713-1784) et d’Alembert (1717-1783) les techniques deviennent objet de connaissance , une culture technique émerge.

L’Encyclopédie (1745-1772) procède à la description des outils et des machines et à leur mise en oeuvre. Cette vaste entreprise est une réhabilitation des techniques et des métiers.

Un rappel : au sens antique, l’art – la technè – désigne une activité de production. Art et fabrication se mêlent très étroitement.

Pour Aristote, " la technè en général ou bien imite la nature, ou bien effectue ce que la nature est dans l’impossibilité d’accomplir ". Il s’agit d’une " disposition à produire accompagnée de règles".

La technique peut ainsi être définie comme un ensemble de moyens artificiels et de procédés basés sur l’expérience, codifiés et transmissibles, visant à obtenir tel ou tel résultat dans la vie pratique et intellectuelle.

Au XVIII ème, les arts désignent à la fois les techniques et la création artistique. Encore faut-il distinguer les arts libéraux et les arts mécaniques.

1.Les arts libéraux

Les arts dignes de l’homme libre, les ouvrages de l’esprit.

Ce qui fait appel aux facultés intellectuelles : les lettres, les sciences, la musique… la peinture, la sculpture, l’architecture.

2.Les arts mécaniques

Les arts de la main. Ce qui désigne souvent des métiers fatigants et salissants. Ce qui exige des manoeuvres physiques, une habileté dans l’exécution. Type d’arts qui requiert des savoir-faire spécialisés et la connaissance des matières.

A l’article " Arts " de l’Encyclopédie, Diderot dénonce ce clivage :

" les arts libéraux se sont assez chantés eux-mêmes ; ils pourraient employer maintenant ce qu’ils ont de voix à relever les arts mécaniques. C’est aux arts libéraux à tirer les arts mécaniques où le préjugé les a tenus si longtemps ".

Ce préjugé, "l’art et la mécanisation ne peuvent que s’exclure", reste vivace. On le retrouve dans l’opposition contemporaine Technique / Art.

La Technique.

Monde des artifices, des artefacts.

Monde utilitaire, pragmatique, mécanisé

et fonctionnel s’appuyant sur des règles, des savoir-faire (le bel instrument est celui dans lequel matériau, fonction et forme se répondent).

La technique relève d’une production très rationalisée et contrôlée.

L’Art.

Tout ce qui traduit la prééminence de l’esprit.

Ce qui laisse une certaine place au hasard, à l’aléa. La célébration du matériau va de pair avec l’effacement de la main. L’activité artistique, en effet, n’est pas réductible à un ensemble de règles.

Comment donc saisir ce paradoxe : si l’art a besoin de méthode, l’art ne saurait se contenter d’aucune méthode.

Pourquoi, dans l’art moderne, la technicité est-elle très souvent mise entre parenthèse, voire dépréciée ?

J.P Seris dans, La Technique, 1994, fait ce constat :

- "l’aspect artistique des techniques s’évanouit ",

- "l’aspect technique des arts s’éclipse, s’estompe "

Ne faut-il pas alors montrer que les gestes, les productions technologiques et industrielles appellent l’expression artistique ?

Problème : est-il possible de reconnaître, dans l’art, la part (le pouvoir) de la technique? Parallèlement, comment l’art débarrassé de l’idée de Beau peut-il faire place au sens ?